La Tunisie a besoin de contrôle international pour les prochaines élections de Juillet
Une définition mal placée de la souveraineté pourrait faire dérailler la transition à la démocratie en Tunisie
Par Radwan A. Masmoudi
Président
Centre pour l'Etude de l'Islam et de la Démocratie
La Semaine derniere, Dr, Iadh Ben Achour, Président de la Commission Supérieure de Réforme Politique, a annoncé que la Tunisie n'a pas besoin et n'aura pas d'observateurs internationaux pour les élections. Je pense qu'il s'agit d'une définition mal placée de la souveraineté et une contradiction majeure de ce que les responsables du gouvernement (y compris le Président et ancien Premier Ministre) ont annoncé immédiatement après la révolution. La Tunisie n'a jamais organisé d'élections libres et équitables dans le passé, et la plupart des Tunisiens ne croient pas à la fiabilité des résultats des élections sans supervision et contrôles internationaux.
L'excès de «sensibilité» quant à la participation étrangère est mal placé dans ce cas. Il a été utilisé abusivement par tous les gouvernements et les régimes répressifs pour justifier la falsification des élections. Ceci a été largement pratiqué auparavant, sous Ben Ali, Moubarak, Saleh et les autres dictateurs arabes.
La "Souveraineté" réelle appartient au peuple, et la meilleure façon de protéger la souveraineté du peuple est de s'assurer que les élections soient libres et équitables. À l'heure actuelle, de nombreux Tunisiens ne croient pas que ce gouvernement intérimaire est capable d'organiser des élections véritablement libres et équitables, et ont peur que les élections ne reflètent pas la volonté du peuple, à l'instar de toutes les élections passées.
La meilleure façon pour les tunisiens, de se protéger contre ces dérives et de garder leur dignité est de demander une "supervision internationale" des élections avec l'aide de l'Organisation des Nations Unies, les États-Unis, l'UE, la France, l'Allemagne, la Ligue Arabe, ainsi que de nombreuses organisations non-gouvernementales qui ont une grande expérience et une expertise dans le domaine de la surveillance et la supervision des élections. Les observateurs internationaux sont le meilleur moyen, et peut-être le seul, pour garantir que les élections seront libres et équitables et que le résultat sera accepté par tout le monde.
Il existe essentiellement trois niveaux de participation internationale dans toutes les élections:
Niveau 1 - Observer - Cela permet à la communauté internationale d'envoyer des gens à «observer» les élections, alors que le gouvernement contrôle l'ensemble du processus. Ceci lui permettra de limiter ce que les observateurs peuvent voir. Il s'agit d'un niveau minimum de participation d'ordre symbolique. Ainsi rien n'empêchera le gouvernement de falsifier les élections.
Niveau 2 - Contrôler - Cela permet à la communauté internationale à envoyer des gens à «surveiller» les élections, ce qui inclut d'être impliqués dans la conception et le suivi de toutes les phases du processus électoral. Les moniteurs ont généralement le droit de «surveiller et de conseiller" à chaque étape du processus, mais la décision finale reste au gouvernement. C'est le niveau moyen de participation. Il sera peut être difficile, mais pas impossible, pour le gouvernement de falsifier les élections.
Niveau 3 - Superviser - Cela permet à la communauté internationale de superviser l'ensemble du processus, et d'être impliquée dans la conception, la mise en œuvre et le suivi de toutes les phases du processus électoral. Il s'agit du plus haut niveau de participation et garantit essentiellement que les élections seront libres et équitables puisque la communauté internationale et les diverses ONG ont besoin d'être totalement neutre dans l'ensemble du processus.
Étant donné que la Tunisie n'a jamais organisé d'élection libre et équitable dans le passé, et que le peuple Tunisien a une confiance minime dans les institutions de l'Etat et le gouvernement (en particulier le Ministère de l'Intérieur) qui sont encore très largement dominés par les anciens membres et fonctionnaires du RCD , et compte tenu de l'importance de la réussite de ces élections pour la transition de la Tunisie vers une démocratie réelle et effective, la meilleure façon de garantir que les élections seront libres et équitables est de les organiser sous une supervision internationale (niveau 3).
Certains Tunisiens vont s'opposer à cette idée de peur que le contrôle international s'élèvera à «Ingérence» dans la politique du pays ou la réduction de la souveraineté de la Tunisie. Au contraire, la communauté internationale, en particulier l'Organisation des Nations Unies, et des dizaines d'ONG internationales ont des décennies d'expérience et d'expertise dans la conception, la mise en œuvre et le suivi des élections libres et équitables dans divers pays à travers le monde. Ils sont beaucoup moins susceptibles de prendre parti ou de favoriser un parti contre l'autre.
Nous aurons besoin d'au moins 10.000 observateurs internationaux pour garantir que les élections seront libres et équitables. Sinon, je crains que la crise se poursuivra et personne ne croira réellement au résultat des élections.
Le peuple tunisien est inquiet au sujet du succès de la paix et démocratie de la révolution, et est préoccupé par les tentatives de la « garde ancienne » pour faire dérailler ou de voler ses fruits.
Il est vraiment essentiel que les prochaines élections (pour élire l'Assemblée Constituante le 24 Juillet) soient totalement libres, justes et crédibles aux yeux de tous les Tunisiens. Il ne doit y avoir absolument aucun doute sur les élections ou leurs résultats, pour que tous les Tunisiens continuent à croire en leur démocratie naissante, restent engagé dans le processus politique, et évitent l'instabilité ou turbulences. Cela est essentiel pour le succès de la révolution démocratique et la transition vers la démocratie en Tunisie.
À la lumière de tout cela, le gouvernement tunisien et tous les Tunisiens doivent faire appel à l'aide de la communauté internationale dans l'organisation, la mise en œuvre et le suivi des prochaines élections. Dans quelques années, lorsque la démocratie est plus établie et les institutions de la démocratie sont plus fortes et plus crédibles, la Tunisie peut espérer organiser, toute seule, des élections libres et justes.
Des élections réussies et crédibles peuvent ouvrir la voie à une véritable démocratie, et ne devrait pas être diminuée par une définition mal placée de la «souveraineté».
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P.S. Prière de diffuser et publier a la plus grande échelle possible. Merci.

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